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2 avril 2024 2 02 /04 /avril /2024 15:39
"Pour moi, il est essentiel de défendre les espaces publics et même d'en conquérir parmi les espaces semi privés (centre commerciaux, halls d'immeubles, couloirs de métro...) envahis par la publicité. L'art doit aussi être utilisé pour créer de l'empowerment et replacer le public, le citoyen, l'humain, mais aussi la nature et les non-humains, au centre de ce pourquoi on crée."
 
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Crédit : Joanie Lemercier
1. Qu'as-tu fait avant d'intégrer le Master Projets culturels dans l'espace public, et que fais-tu depuis ? 
Avant le Master, j'ai fait un bac arts appliqués puis un BTS communication visuelle suivi d'un DSAA (équivalent Master) arts et techniques de communication à l'école Estienne, et enfin un DNSEP (équivalent Master) à l'école d'art d'Amiens. J'ai travaillé comme directrice artistique sur plusieurs projets d'identités graphiques ainsi que sur plusieurs designs de livres d'arts. J'ai également réalisé plusieurs projets d'expositions et d'installations. Je suis actuellement curatrice indépendante et co-directrice d'un studio artistique. Je travaille pour différents festivals et lieux culturels pour la création de parcours artistiques ou d'expositions avec des projets utilisants les technologies mais aussi parfois des projets tout à fait analogiques. Au sein du studio de l'artiste Joanie Lemercier*, je codirige les projets et la direction du studio. Nous réalisons des installations à différentes échelles, des expositions, des projets qui proposent de nouveaux imaginaires.
 
2. Que défends-tu ?
J'ai voulu rejoindre ce Master car la question de l'art dans l'espace public m'a toujours accompagnée. J'ai eu la chance de grandir à Nanterre et de faire l'expérience du festival Parades dès mon enfance [Parades est un important festival des arts de la rue, créé à Nanterre en 1990, organisé au mois de juin ; infos]. Je continue à porter aujourd'hui la volonté de préserver l'espace public comme un espace de conquête et de liberté, un espace où il est possible de toucher un public qui ne passe pas la porte des musées et des centres d'arts. J'ai à cœur de montrer les arts numériques dans l'espace public sans le côté "grand spectacle" de mauvaise qualité qui est malheureusement majoritaire. Je suis convaincue qu'on peut proposer des projets artistiques de grande qualité à un large public de manière gratuite et inattendue. Dans mon travail de curatrice, je défend une première approche, simple, accessible et poétique qui peut ouvrir la porte à une deuxième lecture plus complexe et pédagogique. Ainsi, je privilégie les projets dans lesquels la question des technologies est secondaire afin de ne pas créer de distance avec le public. Je cherche aussi à éviter le rapport dominant / dominé qui existe souvent pour placer le plus grand nombre dans une position de consommateur. J'explore les questions d'interactivité au sens large et de manière amusée. J'aime aussi brouiller les pistes avec du high tech low tech, du super mécanique analogique, de l'hyper numérique simple...
 
3. Quels sont les enjeux culturels majeurs actuellement à tes yeux ?
Pour moi, il est essentiel aujourd'hui de défendre les espaces publics et même d'en conquérir parmi les espaces semi privés (centre commerciaux, halls d'immeubles, couloirs de métro...) envahis par la publicité. L'art doit aussi être utilisé pour créer de l'empowerment (je n'aime pas le mot "empouvoirement") et replacer le public, le citoyen, l'humain, mais aussi la nature et les non-humains, au centre de ce pourquoi on crée. L'art peut être un vecteur de discussion, d'apprentissage, mais aussi et surtout de questionnement. Dans les projets récents menés au sein du Studio Lemercier, nous questionnons notre rapport aux technologies, l'extractivisme dont nous dépendons, nos besoins énergétiques... Ce faisant, nous tentons de déployer de nouveaux imaginaires technologiques mais sobres, conscients et low-tech, non énergivores. Je crois indispensable de responsabiliser encore plus les artistes et curateurs au rôle fondamentalement politique de l'art comme force de proposition dans le débat public et à la question de quel.s future.s nous voulons.  Beaucoup d'artistes ignorent un super pouvoir qu'ils possèdent qui est d'imaginer et de donner forme à des choses qui n'ont encore jamais été créées. C'est essentiel pour que le plus grand nombre élargisse sa capacité de projection !
 
4. Que veux-tu faire dans les prochaines années ? Quelles idées veux-tu défendre ?
J'aimerais développer plus de projets dans des contextes naturels (jardins botaniques, parcs, chemins de randonnées, espaces loin de tout...) et en parallèle continuer les parcours à échelle de ville mais que j'aimerais faire exister dans le temps long afin d'infuser plus dans le quotidien des habitants.
 
Pour aller plus loin : site de Juliette Bibasse, Instagram, site du Studio Joanie Lemercier.
 
Entretien avec Juliette Bibasse sur son travail de curation à Leuven : podcast RTBF

 

Artiste et activiste environnemental, Joanie Lemercier fonde le studio homonyme en 2013. Sous la direction artistique de Juliette Bibasse, le Studio Joanie Lemercier signe des œuvres multimédia poétiques contemplatives et engagées. Travaillant avec des médiums hétérogènes, sa recherche s’étend du dessin mural au travail sur l’eau, des sculptures en papier aux lasers ou encore à la vidéo projection. La lumière est son médium privilégié, un véritable outil d’écriture dont le support est notre environnement. 

 

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Published by Master Projets culturels dans l'espace public - dans Les étudiants Parcours d'anciens étudiants